17 juillet 2024 3 17 /07 /juillet /2024 10:56

 

 

 

Vous trouverez ci-dessous une vidéo, tirée de notre

visioconférence du 26 mai 2024.

 

Le thème proposé était:

L'homme peut-il être libre de la peur?

 

 Qu'est-ce que la peur, quelle relation avons-nous avec elle ?

 

Peut-on vivre sans être sous le joug de ce sentiment ? Quel est le lien entre le temps, la mémoire, la pensée et la peur ? La peur n'est-elle pas simplement une pensée qui se prend au sérieux? C'est une pensée parmi d'autres pensées, parmi le flux des pensées.

 

Si l'esprit humain découvre autre chose que le mouvement des pensées, s'il devient libre de la mémoire, que devient la peur?

 

En allant par-delà du mouvement habituel de son esprit (mécanique et mémoriel), l'homme découvre le véritable domaine spirituel...

 

 

_______________________________________________

 

 

 

L'enregistrement proposé ici, comprend uniquement la partie questions-réponses de la visioconférence.

 

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12 juillet 2024 5 12 /07 /juillet /2024 15:27

                                                                                                                                                                                                                    Texte écrit le 1 Janvier 2005
 

  

 

 

  Apprendre consiste d'abord à voir par soi-même ; à découvrir, à observer et à tester ce que l'on vous dit. Donc si ce postulat  veut s'appliquer, dans un premier temps on arrête d'affirmer, de nier ou de confirmer toutes les idées de ce monde.

  Aucune conception ou théorie n'est acceptée d'office sans avoir été jugée et soupesée par votre regard, mais au début vous ne pouvez pas être certain que votre regard soit libre de toute théorie. Vous devez observer également votre façon de penser et de jauger les événements, vous devez observer le mouvement de votre esprit et voir si lui-même, n'est pas déjà le fruit d'une conception établie .

  Car si tel est le cas, votre regard est faussé, il est orienté par cette « croyance » interne.

 

  Donc, il faut être conscient des conditionnements extérieurs, tels que la culture, la famille, la pression sociale ou la mode ; et voir également qu'il y a un mouvement identique dans l'esprit, la pensée « est » conditionnante,  elle se nourrit elle-même.

 

  En fait, il faut saisir simplement que l'acte d'apprendre touche l'ensemble de la vie. L'activité extérieure et l'activité intérieure ne sont pas séparées, elles se créent ensemble. Le monde est à l'image de l'homme, la violence de la société « est » la violence de l'homme. Et l'homme se laisse influencer par la société, il dénie ainsi sa responsabilité  et se lave les mains.

  Donc l'observation se met en place, mais est-ce vrai ? Ou bien est-ce une autre théorie, s'il vous plaît ? Cette action ne se met en place réellement, que si on a véritablement compris qu'il faut tout découvrir par soi-même, cela n'est pas de la philosophie.

 

  Examinons mieux le fait, « je dois tout voir par moi-même » ; je suis arrivé à cette conclusion, car j'ai vu que l'état déplorable de notre monde « est » le résultat des traditions, orientales ou occidentales, les traditions racontent toutes la même misère du monde et de l'homme. La violence de ce monde est un produit, est le fruit de ces systèmes millénaires. La responsabilité de l'histoire leur incombe, et nous voyons leurs castes et leurs religions organisées. Tous parlent de textes sacrés, de livres anciens, ou bien de personnes  extraordinaires, et ils répètent tout ce qui est écrit dans leurs textes ou ce que d'autres ont dit.

  Ils ne font que commenter, écrire sur les paroles d'un autre, puis ils commentent les commentaires, de manière obsessionnelle, comme une maladie qui les ronge ; ils ne s'en sortent pas, et ils plongent le monde dans l'abîme.

 

  Donc nous voyons que le monde des traditions, qu'elles soient  religieuses, philosophiques, politiques ou autres ne nous mènent nulle part, elles ont créé ce monde de souffrance. Donc je ne leur accorde aucun crédit, l'ensemble de ces systèmes « est » le moteur de ce monde de misère et de violence.

  Il y a aussi le monde contemporain, qui pour une grande partie s'est construit en réaction, par rejet des traditions religieuses et puritaines. Mais ce rejet  est le résultat de la pression imposée par l'autorité religieuse, c'est une réaction conditionnée par cette pression, donc cette action n'est pas libre. Elle est très superficielle, en surface, si on regarde on voit que les bases sont identiques aux traditions.

  Abus de pouvoir, accumulation de richesse, mensonges et violences ; propagandes politiques sur le même mode que les propagandes religieuses. L'habit a changé de couleur, mais celui qui le porte reste le même.

 

  Comme il n'y a pas eu d'approfondissement concernant les bases du conditionnement, on a simplement troqué l'habit du moine ou de l'évêque, pour celui du PDG ou de l'homme politique.

 

  Mais ne nous leurrons pas, les traditions sont responsables certes, mais le tout premier c'est l'homme lui-même, c'est l'esprit de l'homme qui engendre le monde.

  C'est l'esprit qui a construit ce monde avec ses religions, ses mouvements politiques, Staline, Hitler, toute cette folie qui gangrène  notre monde.

 

  Nous sommes responsables de « ce qui est ».

 

  Et donc, par cette perception qui se met en place, je comprends que «  je dois tout voir par moi-même ».

  Il s'agit de remettre en cause le monde des idées, des croyances humaines, pas le monde réel. La montagne qui vous entoure, la pluie ou la neige qui tombent sont une paix pour l'esprit, ancrez-vous dans ce réel. Voir consiste déjà à distinguer le Réel de l'imaginaire, on peut faire confiance bien plus à notre corps qu'à notre esprit.

  Attention à ne pas faire de tout ceci une théorie savante et subtile ;  mais si cela se passe, quand cela à lieu, alors observez le directement, voyez  dans le vif  son apparition. Percevez comment se crée une pensée, mais sans en créer une autre par-dessus, un commentaire sur un commentaire. Voyez comme l'esprit humain agit toujours de manière identique, comme les traditionalistes, ne commentez pas votre commentaire. Cela peut devenir une habitude grisante, car vous cultivez ainsi une connaissance qui grandit dans le temps.

  Ce qui se nourrit du temps satisfait pleinement l'esprit et la pensée,  mais par cette action vous ne faites alors que prolonger le monde également, avec tout son cortège de malheurs.

  La connaissance et le temps sont l'œuvre de la pensée, ils nourrissent la seule théorie qui vaille pour l'esprit, voyez comme « la connaissance de soi » crée la croyance du moi, de l'entité séparée, de l'âme.

 

  Cela est le triomphe de l'esprit, de la pensée, mais voyez bien comme cette chimère ne résout absolument rien ; le monde se meurt toujours et vous êtes enfermé dans votre solitude totale.

 

  Nous voyons donc, la nécessité de voir par soi-même, et nous voyons également le danger de s'enfermer dans le piège subtil de la pensée. Pour avancer dans la vie de tous les jours, il n'y a aucunement besoin de faire un effort quelconque, il ne faut pas chercher à changer.

  Vouloir changer sans être libre, c'est juste modifier la prison, l'aménager différemment, et cette volonté de changement est créée par la prison ; pour l'instant le mouvement du mental « est » le mouvement de la prison. Il faut juste le regarder, l'observer, le disséquer, le comprendre chaque jour de manière plus sensible et plus vivante.

  Et le meilleur terrain pour cela, voyons évidemment que c'est le quotidien de la vie, car ce quotidien, ce n'est pas une chose de l'intellect, cela fait partie du réel.

 

  • - Distinguons bien le réel, avec sa richesse et son imprévu, et le mouvement du mental qui crée de la pensée. Notons bien, que la pensée mise à sa juste place fait partie intégrante de ce réel. C'est sa prépondérance qui pose problème, c'est le fait que l'esprit humain ne sait pas agir sans la pensée. Cette importance cruciale donnée à la pensée «est» la source de tous les maux de l'homme.

 

Donc, « je dois voir par moi-même », apprendre à bien distinguer « ce qui est » des créations purement mentales. Et le meilleur endroit et la meilleure action pour cela c'est la vie de tous les jours avec mes relations aux autres, c'est dans cette confrontation avec le réel que je peux voir ce qui est issu d'une théorie. Et voyez bien cette bénédiction véritable, plus vous comprenez le mécanisme des théories, plus vous vous en libérez, alors  cette liberté vous rend disponible pour le monde tel qu'il est.

  L'observation, l'attention sont les actions les plus importantes qui soient, plus vous apprenez à voir, plus vous êtes sensible ; et dans cette action regardez bien, vous « apprenez » sans cesse, vous découvrez sans arrêt.

 

  Par cette attention calme à « ce qui est », on découvre ce qu'est voir.

 

  - Ce mouvement alors ne peut avoir de fin, le savoir n'existe plus, de même que le temps;

  - Vous êtes hors de l'histoire, alors véritablement se crée un autre monde.

 

 

 
  Paul Pujol, "Correspondances".

  Editions Relations et Connaissance de soi.

  "Voir par soi-même", pages 24 à 28.  

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12 juin 2024 3 12 /06 /juin /2024 16:38
La vénération du temps...

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1 juin 2024 6 01 /06 /juin /2024 09:38

 

 

 

 Nous vous présentons ici, une vidéo tirée de

la visioconférence du 26 mai dernier.

 

Le thème abordé étant le suivant:

 

La méditation,

l'au-delà de la pensée et du temps.

 

La méditation est l’aspect purement technique, il y a toutes sortes de méditation. Il est préférable de se tenir à l’écart des croyances religieuses et d’avoir une approche laïque.

 

Observer son esprit, le mouvement des pensées. Voir comment ce mouvement semble s’imposer à nous, il s’invite sans avoir été désiré.

Mais si on devient un peu familier avec ce mouvement, on se rend compte que c’est nous qui l’alimentons, consciemment ou inconsciemment. En découvrant cela, on voit que l’on peut donner de l’intensité ou pas aux pensées. On découvre notre rôle.

 

Quand on observe longtemps, pas juste dix minutes, ou bien un jour ou deux, mais pendant des années, 25 ans, 30 ans ; on devient alors intime avec l’esprit, il nous devient familier.

On peut découvrir alors la demeure de la non-pensée, on reste dans cet état, on l’explore . Et par la suite on découvre aussi l’état qui est absence de pensée, mais aussi absence de la non-pensée. On reste face à cela, on y plonge profondément. Puis vient l’état de paix profonde, au-delà de tout, au-delà de soi et du non-soi.

 

Cette paix très profonde est très différente d’un simple sentiment de bien être ou de relaxation. En Orient il y a le mot « Samadhi », qui désigne quelque chose de très profond, un sentiment d’union avec le réel et avec « l’au-delà ». Dans cette médiation qui existe depuis si longtemps, existe ce sentiment océanique d’union avec le monde dans sa totalité, et avec ce qui est au-delà du monde. Dans cet état il n’y a plus aucune séparation d’aucune sorte, et le monde et son

au-delà ne sont qu’un.

 

Oui mais voilà, et notre vie quotidienne quand est-il ?

Il semble y avoir une telle dichotomie entre la méditation et la vie de tous les jours. Et l’aspect purement technique de la méditation peut devenir un refuge contre l’absurdité apparente de la vie. « C’est en méditant que je suis bien, ça m’aide à supporter la vie ». Ce faisant, on devient dépendant de la méditation, de « sa pratique », et ce qui devait m’aider à mieux me comprendre et comprendre la vie, devient une prison, on je m’enferme pour m’abîmer dans un plaisir puéril.

La dépendance n’a pas été vu.

 

On peut re rendre compte de cet attachement, et y mettre fin par la vision pénétrante. Alors on médite, mais on reste libre, et par cela on découvre qu’on peut aussi observer son esprit dans la vie quotidienne. Donc on étant son regard également à l’extérieur, comme à l’intérieur de soi, on ne fait plus de différence.

La vie se révèle alors dans toute sa beauté.

 

On voit alors qu’il existe un regard qui ne regarde pas les choses comme étant anciennes, comme du déjà vu, un regard usé en quelque sorte. Et il y a quelque chose de mystérieux qui se met en place, et au fil des années on ne voit pas non plus les choses comme pour la première fois, vierge et libre du passé. Car dire cela est neuf, c’est à nouveau s’inscrire dans le temps... Devant nous existe le monde et son au-delà, est cela n’est ni vieux, ni neuf, ni ancien, ni nouveau, cela est différent, c’est un état intemporel, sans aucun temps. Quelque chose d’immense entre en existence, avec une telle énergie et une

beauté créatrice.

 

La méditation est un voyage hors du temps, où le voyageur

n’existe pas.

 

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16 mai 2024 4 16 /05 /mai /2024 14:09

  Les berges de Saône

                
                                                                                         

     Suite à notre réunion où nous avons abordé le sujet de la méditation, je me permets d'apporter cette vision, car le sujet est important, et il me semble que nous avons peut-être différents malentendus entre nous.

 

    Tous d'abord, qu'est-ce que la méditation ? L'origine étymologique est connue de tous, il s'agit "de soupeser, de peser les choses, de les évaluer en profondeur", en quelque sorte mener un examen attentif concernant un sujet. Donc il y a une démarche de compréhension, de perception de ce que l'on observe, n'est-ce pas ? Concernant une prison mentale par exemple, pourrait-on dire que quand la perception est vivante, elle met fin à la prison ? Et comme nous l'avons vu ensemble, alors cette fin, cette mort, donne naissance à quelque chose d'autre. La démarche de "la connaissance de soi", met fin aux conflits, aux tensions internes, de cette fin naît véritablement l'ordre dans la maison du mental. Alors quelle est maintenant le mouvement de la méditation ? La prison n'est plus, et maintenant commence toute l'exploration de la liberté, et en cela l'esprit aborde la dimension profondément religieuse de la vie. L'ordre est là, l'énergie qui était dépensée depuis toujours pour mettre de l'ordre, cette énergie se trouve donc totalement disponible. C'est comme le mouvement non pas dans l'infini, mais le mouvement de l'infini lui-même. L'infini, cela veut dire ne pas avoir de fin, et s'il n'y a pas de fin, excusez-moi, cela veut dire qu'il n'y a pas de début ! N'est-ce pas ? Donc la liberté commence-t-elle vraiment un jour ?

 

     Cela me paraît très important, je me permets d'insister un peu. La liberté débute-elle véritablement ? Ce qui est certain, c'est que la prison, elle, finit, si on voit directement un danger, on s'écarte de cela. Quand on voit le non-sens total des croyances, véritablement, aussi clairement qu'une montagne, alors l'attachement aux croyances cesse, et tous ces systèmes n'ont plus aucune prise sur l'esprit. Cela est fini, pour toujours ! Pouvons-nous observer quelque chose, s'il vous plaît ? Ce qui est né, cela peut également finir n'est-ce pas ? Les croyances existent parce qu'il y a des causes qui les ont engendrées, elles ont une origine, et ce qui a une cause peut subir un effet. Voyons-nous bien ce que nous disons ici ? Une cause est une condition d'origine, la croyance est liée aux traditions religieuses, à la culture, à l'environnement social. Les croyances sont le résultat de la pression exercée par l'extérieur, elles sont conditionnées par l'histoire de l'humanité ! 
    Si nous disons, "non-merci je ne veux pas de ces traditions, très peu pour moi. Aucun de ces dieux ne m'intéresse, je vous en prie !" Si l'esprit s'arrache vraiment aux religions, existe-t-il encore quelques croyances ? Mais alors est-ce la liberté qui commence ? Ou bien est-ce simplement la fin d'une illusion, et par cela l'esprit accède au réel. C'est la découverte de cela, mais la fin de l'illusion n'a pas créé le réel. Par la fin du temps, se révèle l'intemporel. La liberté ne commence pas, car elle est sans cause aucune.

 

    Il me semble que le mouvement de la méditation, c'est toute l'exploration de ce vaste continent ; et en cela aucune halte ne peut exister, car il n'y a personne pour faire cette halte. Seul existe ce mouvement sans fin, cette énergie sans limite. Excusez-moi encore d'ajouter ceci : L'énergie pure est sans ordre aucun, la liberté n'a aucun plan, ni tracés prédéfinis. Cette vérité n'a donc absolument aucun chemin d'accès. Mais alors, qu'est-ce donc que tous ces exercices ? Qu'est-ce donc que la méditation des traditions religieuses, principalement orientales ? Il existe différentes méthodes, selon les écoles et les maîtres en vigueur. Il n'y a pas une méditation, mais il y a de très nombreuses formes d'exercices, tous très différents, du plus simple au plus complexe. Du plus beau au plus torturé, il existe même certaines mortifications.

 

    Pourrions-nous déjà ne pas appliquer le terme de méditation à toutes ces choses ? Car nous essayons d'avoir une approche nouvelle de tout cela, donc peut-on ne pas employer le mot méditation pour tous ces exercices ? Pourquoi faire cela ? Pour simplifier et démystifier toute cette fantasmagorie ! Maintenant peut-on apprendre cela, sans adhérer de nouveau à une croyance, et sans se soumettre à une autorité ? Il existe le hatha yoga, le yoga physique, où normalement très peu de croyances existent. Mais si on vous propose par exemple une "méditation" sur une divinité, cela sous-tend que vous devez accepter la possibilité de son existence, et vous voilà repartis dans un système de croyance. De même, si on sous-entend qu'il vous faut être initié par un maître authentique, car celui-ci vous donnera l'énergie pour que la "méditation" soit opérationnelle, vous devenez dépendant de ce maître. Et par cette personne, par votre soumission, vous vous rattachez à toute la lignée de gurus dont il se réfère. Par cette action vous êtes lié, et vous devez le respect, de là fleurissent les prosternations et les génuflexions devant des images d'idoles au début, puis bien vite devant des personnes.

 

    Au-delà de ces formes d'asservissement, existe-t-il des exercices utiles, où des jeux mentaux qui permettent de voir ce qu'est notre mental, ce qu'est notre pensée ? Il est évident que si l'on n'a jamais observé son esprit, on ne peut le comprendre ! Peut-on parler du mouvement des pensées, sans jamais l'avoir observé une seule fois ? Là, nous restons dans quelque chose de sain, de non-corrompu. Donc il est important d'observer son esprit, de le regarder attentivement, comme dans l'origine étymologique du mot méditation. Simplement observer le mouvement des pensées, voir comment elles arrivent dans l'esprit, comment elles se pressent les unes les autres. Prendre conscience de ce mouvement incessant, l'observer et voir que c'est nous, l'esprit qui alimentons ce flux. Là dans cette observation, on remarque que si on regarde de manière neutre, en prenant de l'espace, ce mouvement se fait moins impérieux, et si on commente, les pensées affluent à nouveau très rapidement.

    Donc on prend conscience de ce mécanisme, alors on cesse d'alimenter ce mécanisme, et l'on voit le mouvement des pensées se tarir de lui-même sans effort. Dans cette action existe un espace différent, où les pensées sont moins dominatrices, et dans cet état apparaît alors une quiétude nouvelle, une tranquillité profonde. On prend conscience de ce calme profond qui existe au-delà des pensées, on l'explore tranquillement. Il n'y a rien de mystique dans cela, c'est comme l'inspiration et l'expiration de l'air dans les poumons, il y a pensées et il existe également absence de pensées. Bientôt, on trouve plus rapidement ce calme profond, il devient intime et familier, mais si l'on est intègre, alors on n'accorde plus aucune importance à ce calme même. On ne s'attache pas à cela, et l'on demeure dans le silence. Là, dans ce grand silence, une pensée peut advenir, cela n'a pas d'importance, car elle meurt aussitôt, on oublie même le calme et le silence. Alors on découvre quelque chose de très très différent, une qualité de présence autre, quelque chose de profondément immense...

 

    Excusez-moi pour cette description, mais avec de l'entraînement beaucoup de personnes connaissent ces états, et alors ? De cela surgit-il une compréhension, une vision pénétrante de l'esprit ? Cela amène-t-il l'esprit à se déconditionner ? Il me semble que tout ceci est plutôt une décontraction profonde, ou plutôt une relaxation très profonde, cela donne du bien-être. Mais pourquoi vouloir lui attribuer une valeur "spirituelle" ? C'est comme le Yoga, cela est bon pour le corps, pour sa santé, mais de là à dire "faites du yoga, et vous progresserez dans la connaissance de soi, vous vous rapprocherez du divin". Mais il y a du danger dans tout cela, car ce grand calme profond, l'esprit peut en faire son jouet. Cet état peut devenir objet de désir, de plaisir, car en fait, c'est plutôt bon, n'est-ce pas ? Je pense qu'à une époque récente, ou peut-être encore de nos jours certaines personnes expérimentent des choses proches en prenant des drogues, cela est plus expéditif, mais assez similaire. Si l'esprit n'était pas puéril, il ne transformerait pas tout ceci en recherche de simples sensations. En slogans vite trouvés, et vite devenus propagandes.

    La relaxation profonde existe, mais le terme de "méditation" n'est pas approprié, n'est-ce pas ? Ce qui est certain : C'est qu'il ne peut exister de méthodes ou d'exercices, qui puissent amener à l'éveil. La liberté ne peut avoir de causes, cela ne peut-être le résultat d'une action mécanique, même subtile. Tout cela me parait très important, afin de ne pas retomber dans le même monde de traditions et religions créées par l'homme. Cela ne veut pas dire que nous n'avons pas de respect pour les personnes qui sont dans ces pratiques. Ce n'est pas par arrogance ou mépris que nous disons cela, c'est l'injonction de la vérité qui nous demande d'observer cela, sans jugement aucun, mais avec lucidité et équité. Excusez-moi messieurs et mesdames, mais nous connaissons tous quelqu'un qui est allé au-delà de tout cela, au-delà de ces systèmes, de ces traditions et de toutes ces autorités.

 

    Pourrions-nous éviter de retomber dans le monde des limitations, cela n'est sûrement pas lutter contre quelqu'un ou quelque chose, mais dire simplement ce qui est, l'apparence de la vérité n'est pas la vérité. Une partie de la vérité n'est rien, la totalité de l'existence se doit d'être éclairée par cette vérité. Voyons bien, le yoga ou les relaxations profondes peuvent peut-être avoir leurs utilités, mais cela reste au niveau de la connaissance mécanique de la pensée. On peut voir les pensées arriver et aussi les voir mourir, on peut constater qu'il existe un silence au-delà de ces pensées. Un calme profond peut naître dans l'esprit quand celui-ci n'est pas submergé par le mouvement du mental. Mais l'esprit peut se fourvoyer dans cette action, il peut en faire maintenant une recherche de plaisir, une volonté de rester dans cet état de quiétude. L'esprit puéril peut très bien en faire son jouet, "quel plaisir quand je suis dans cet état, quelle paix" et l'on compare cela à notre vie quotidienne qui est exsangue de toute cette paix. Donc, cette relaxation profonde devient le stimulant de notre vie, sans cet exercice, ma vie n'a plus de sens. N'est-ce pas ? Bien des gens, ces fameux pratiquants de toute sorte, dès que l'on ose mettre en question leur pratique, on voit dans leur regard la peur et le désarroi, et parfois même arrive rapidement un sentiment de grande violence. L'esprit pratique depuis très longtemps toutes ces techniques, l'Asie est devenue pour certains la spécialiste de toutes ces choses. Mais puis-je poser une question et demander une observation honnête et sincère de tous, dans tous ces exercices, y a-t-il apparition de la vision pénétrante, y a-t-il déconditionnement de celui qui observe ?

    C'est comme dans les phénomènes de visions extatiques, si on regarde vraiment ce qui se passe, avec sincérité, y a-t-il compréhension profonde ? Ne serait-ce pas des sensations, certes hors-normes, mais ce sont des sensations. Des expériences comme d'autres expériences, ni plus, ni moins. Dans ces états provoqués - car ils sont provoqués, n'est-ce pas ? Sincèrement, il y a très peu de vision pénétrante, de libération et de déconditionnement. Cela serait trop simple, il est tellement facile de vivre ces états, avec de l'entraînement de très nombreuses personnes peuvent arriver à vivre cela. Autre chose, il me semble que tant qu'il y a un sentiment de plaisir, ou de quiétude, véritablement c'est que l'esprit n'est pas en silence. Dans une décontraction profonde, très profonde, il n'y a plus de notion de bien être ou de plaisir, il y a le silence et absolument rien d'autre. Il faut être vigilant, et ne pas verbaliser ou chercher à définir ce contact. Le silence véritable, existe quand l'esprit est totalement immobile ! Il me semble sinon, que nous repartons avec toutes ces vieilles choses que l'homme a inventé, pourquoi ne pas repartir dans une grotte en Himalaya ? Il ne s'agit de mépriser, ou de dénigrer qui que ce soit, un homme qui donne sa vie pour étudier la religion est tout à fait respectable ; mais respecter ne veut pas dire se soumettre, ou accepter. Nous pouvons dialoguer avec amitié et affection avec tout homme, quel qu'il soit, moine asiatique, prêtre occidental ou autre. Car c'est avec l'homme que nous parlons, pas avec sa fonction, ou son statut social. En fait ce n'est pas un moine ou un prêtre, c'est simplement un homme comme vous et moi, un être humain en proie à la souffrance de ce monde, comme tout un chacun.

 

    Dire que les religions qui enseignent "la méditation" sont différentes des autres religions, c'est évidemment une erreur, et penser que l'Orient connaît bien mieux tout cela, c'est d'un tel lieu commun...Elles ont tracé les chemins qui mènent à la libération, avec certitude et affirmation, "si vous faites cela, vous progresserez et vous verrez bientôt le très-haut en face à face !" Qu'y a-t-il de nouveau sous le soleil des hommes ? Où est ce sentiment de neuf, de quelque chose qui est bien au-delà des inventions humaines ? Peut-on mettre l'innommable en mots ? Peut-on enfermer la liberté dans des systèmes de pensées, dans des tracés bien aplanis par ceux qui savent ? Krishnamurti n'a-t-il pas existé, n'a-t-il pas indiqué la folie de toutes ces méthodes ? Nous ne comprenons pas bien ce qu'il veut nous indiquer, et nous ne savons pas rester avec cette non-compréhension, n'est-ce pas ? Nous sommes gênés de ne pas saisir ce qu'il nous dit, alors nous allons voir d'autres personnes, des spécialistes du genre, et nous leur demandons ce qu'est la méditation. Alors les explications traditionnelles reviennent, cela nous rassure et de ce fait, nous perdons la lumière de la vérité.

 

  Pourquoi ne pas rester avec cette non-compréhension, cela est notre réel, je ne comprends pas ce que veut dire cet homme ! Tant pis, mais je ne m'endors pas, je reste avec cette présence, ce fait. Je ne lutte pas avec mon état, je suis conscient que je ne saisis pas vraiment. Cela, c'est la vérité, je ne sais pas ce qu'est la méditation ! Voilà le fait, concret, comme la souffrance et la peur. Mais cette même vérité m'indique aussi que ce n'est pas dans les trucs proposés par les religions ou les sectes, que se trouve cette chose que je ne saisis pas. Cette méditation doit avoir un parfum de liberté, comme l'essence de la religion véritable ! Depuis deux mille cinq cents ans ou plus, l'Inde et l'Asie pratiquent ces méthodes, ces continents sont-ils foncièrement différents d'autres continents ? N'y a-t-il pas aussi des guerres, des violences, qu'elles soient politiques ou religieuses ? L'esprit humain est le même, qu'il soit Hindou, Chinois, Européen ou Américain, quel que soit sa religion ou son pays, l'esprit n'a pas changé. C'est une réalité qu'il nous faut voir très concrètement, l'Orient a des traditions spirituelles et religieuses, mais qu'ont-elles fait du sacré ? Une suite de rites, de textes sacrés, une hiérarchie bien précise, et une foultitude de techniques et autres méthodes méditatives. Il existe également de très nombreuses écoles de pensées et de philosophies, mais est-ce différent à travers le monde ? D'autres religions n'ont pas la méditation, mais elles ont la prière, et dans les deux cas maintenant on parle également d'avoir foi, dans les textes et dans les enseignements.

 

    Donc la vérité me montre tout cela, tout ce que n'est pas la méditation ; donc j'élimine le faux, je me débarrasse de ces fardeaux inutiles ? C'est très important, le faux doit bien être perçu pour le faux, il peut y avoir une part de vérité dans ce que disent ces religions, mais une partie n'est pas le tout ! Voyons bien cela, ce n'est pas parce qu'il y a des aspects justes dans une croyance, que la croyance elle-même est vérité. Un fou peut bien vous donner l'heure exacte, ou bien vous indiquer le bon chemin pour aller à la gare, il n'en est pas moins fou. Ce n'est pas parce qu'il dit vrai dans un domaine restreint, un domaine précis, que sa vie et son esprit sont dans la vérité. Donc au fur et à mesure de mon observation j'apprends, je vois ce que n'est pas la méditation, et je vois qu'il y a un rapport étroit avec la vérité.  Je perçois très bien que la vérité doit éclairer toute la vie, doit toucher la totalité de l'esprit. Un éclairage particulier doit être en relation avec d'autres éléments, par exemple, qu'est-ce que la relaxation profonde ? Y a-t-il en cela une dimension du sacré, du religieux ? Pourquoi les religions sanctifient-elles ces actions, comme la méditation ou la prière ? Les religieux accordent une grande importance à tout ce cirque, parce qu'ils estiment que c'est par ce biais que l'homme est en contact avec le divin, c'est cela n'est-ce pas ? C'est par ces moyens que l'homme pense être en contact avec l'autre monde, avec le non-né, l'inconditionné !

    Donc, l'homme veut entrer en contact avec quelque chose de plus grand que lui, mais pourquoi cela ? Pourquoi cette volonté, ce désir universel ? Ne serait-ce pas parce que la vie lui parait insignifiante, dénuée de tout sens, injuste et cruelle ? "Si la vie se réduit à cette immense souffrance, quelque chose ne va pas, ce n'est pas possible ! Il doit exister autre chose, quelque chose que je ne perçois pas, mais il doit exister autre chose", et ainsi naît l'espérance dans le cœur des hommes. De cette espérance découlent alors toutes les affabulations créées par l'homme : Dieu, le diable, les anges et tous les saints, tous les sauveurs du monde Bouddha, Jésus et tant d'autres ; et selon les cultures le nirvana ou le paradis, mais surtout après la mort. Tout ce mouvement vient de la perception du non-sens de la vie, mais surtout de la peur devant ce non-sens. C'est bien la peur de la vie qui anime toutes ces traditions, mais jamais elles ne se penchent vers la cause première : Pourquoi l'esprit ne trouve-t-il pas de sens à la vie ? Pourquoi se fait-il que l'esprit trouve sa vie insignifiante, sans aucun sens, sans justice ?

 

    L'homme voit que la vie est une suite de grandes souffrances, il y a une grande insécurité dans ce monde. La maladie peut m'emporter, on peut me licencier du jour au lendemain, mon amour pour ma femme peut tarir, elle peut également me quitter pour un autre ! Il n'y a rien de certain, de durable, et puis il y a la grande violence des hommes envers les hommes, tellement de guerres, de tueries. Comment cela peut-il cesser à tout jamais ? Peut-on mettre fin à cette immense souffrance humaine, définitivement ? Voilà, la vérité me mène à cette question cruciale, et je perçois que tout le mouvement de l'humanité tourne autour de cette interrogation !

 

  Donc la méditation me guide vers le fait que l'être humain est en grande souffrance depuis toujours, et je vois qu'aucune religion ou autre construction mentale de l'homme n'a pu amener la fin de cette souffrance. Par cette perception, je constate l'inefficacité de toutes les constructions mentales élaborées par l'homme. Je vois parfaitement que tout cela n'a servi à rien, alors dans un éclair de vision pénétrante, l'esprit se déleste de toutes ces choses. Maintenant existe un silence total, aucune théorie ne subsiste dans l'esprit ; alors quand la souffrance se fait jour, on la regarde directement, sans un seul mot, on fait corps avec elle. On apprend à la découvrir, par-là on voit que la peur a cessé d'exister. Quand on voit directement quelque chose, la peur ne peut s'immiscer dans l'intervalle entre celui qui observe et l'objet observé, donc la peur a totalement disparue. Cela est très important, car la peur empêche de voir directement et simplement l'esprit tel qu'il est.

     Maintenant, la vérité me révèle une perception active qui est au-delà des mots et des théories de l'homme. Dans cette perception, j'observe sans peur cette souffrance, je suis avec elle, je ne m'en sépare jamais. Mais je l'examine, et je laisse un espace afin de ne pas être emporté de manière quasi mécanique par son mouvement, donc l'observation se crée. Dans cette dimension, qui est un espace au-delà de la pensée, dans cette liberté, alors vient la compréhension du danger. Voir un précipice, c'est s'en écarter de manière très rapide, sans intervention de la pensée. Comprendre que la souffrance n'est pas une fatalité, mais une création de l'homme, c'est voir et comprendre qu'il y a des causes qui l'ont engendrée, c'est également voir tous les effets terribles qui sont produits par son existence. S'il y a des causes, alors ce qui est peut finir par la suppression de ces mêmes causes, ce qui est créé peut finir ! Alors dans cette perception, l'esprit décide impérieusement de mettre fin à cette souffrance, et déjà un autre mouvement s'anime dans l'esprit, dans le cerveau. On découvre que la méditation est là, c'est le fait de rejeter toutes les valeurs des hommes, toutes ces constructions mentales, c'est cette action qui met en œuvre ce silence immobile. C'est par cette action de liberté, que vient la perception et la compréhension, alors la méditation découvre le réel. Dans cette découverte, par l'action de la vérité, la réalité se transforme alors totalement. C'est cette vérité qui met un terme à la souffrance, ce mouvement met chaque chose à sa place ; alors l'ordre advient, et dans cet ordre nouveau, la méditation aborde un autre rivage. Les conditionnements sont tombés, plus aucune croyance ne subsiste, aucun système pour toucher au divin ne demeure dans l'esprit, plus aucun mouvement, plus un mot, aucune pensée.

 

    Vivre dans ce silence, ne plus avoir quelque chose à comprendre, ne plus avoir de chaînes à démonter, ne plus avoir d'action à faire, être seul face à ce silence insondable. Être attentif à ce qui est, voir la fenêtre et le monde au dehors, les arbres et entendre le chant des oiseaux. Sentir le vent souffler, et soudain être hors du monde. La méditation est l'action d'ouvrir la porte, ensuite le sacré viendra peut-être nous rendre visite ; mais qu'il vienne ou pas, qu'importe, aucun attachement ne doit tenir la lumière de l'esprit. S'il vous plaît, je vous en prie cher amis, ne réduisons pas notre démarche à des choses très banales et mondaines. Ne pouvons-nous pas nous élever au-dessus des idéologies et pratiques humaines ? Gardons haute notre étude de l'esprit, soyons subtiles et attentionnés dans notre démarche ! Je vous remercie encore pour tous nos échanges et ces rencontres, puissions-nous avoir une démarche saine et vivifiante pour l'esprit. Veuillez m'excuser pour la longueur exceptionnelle de ce message, mais le sujet est des plus importants, n'est-ce pas ? Si nous ne prenons garde nous risquons de perdre quelque chose de très précieux.

 

 

 

  Paul Pujol, "Correspondances".

  Editions Relations et Connaissance de soi.

  "La méditation et les traditions religieuses", pages 74 à 87.   

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